Le rôle et l'organisation de la maréchaussée
"La maréchaussée est un corps de gens à cheval établis pour veiller à la sûreté publique. […] Les principales obligations de la maréchaussée consistent à rechercher et poursuivre les malfaiteurs et autres ennemis de l'état ; à garantir le voyageur de leurs entreprises en tenant les grands chemins libres et assurés, à observer les marches des troupes, à veiller au bon ordre dans les fêtes et autres assemblées et à maintenir en toute circonstance la sûreté et tranquillité publiques" (1).
"La maréchaussée était un corps de cavalerie investi des attributions de notre gendarmerie. Dans son dernier état elle se composait de huit compagnies formant chacune un escadron. Son chef, un des grands officiers de la couronne, le prévôt des maréchaux de France, était à la fois un homme d'épée chargé de la recherche des malfaiteurs et un magistrat dont la juridiction, nommée prévôté, s'étendait aux vagabonds, aux gens sans aveu, aux gens de guerre et aux voleurs de grand chemin" (2).
Il n'y eut d'abord qu'un seul prévôt. Plus tard, des nécessités de police en firent établir dans plusieurs provinces.
Afin de mieux comprendre le rôle et le fonctionnement de la maréchaussée au XVIIIe siècle, époque qui correspond aux archives qui ont été conservées dans ce fonds, nous donnons, malgré sa longueur, le texte intégral de l'ordonnance de 1760 concernant le fonctionnement de ce corps (3) :
Titre premier : de la subordination et discipline
article premier
Les compagnies de maréchaussées continueront d'être sous le commandement des sieurs maréchaux de France, conformément à l'article 6 de l'édit de création du mois de mars 1720.
2. Les prévôts généraux continueront d'avoir le commandement chacun dans leur département sur les lieutenants exempts, brigadiers, sous-brigadiers et cavaliers des dites maréchaussées, conformément à l'article premier de l'ordonnance du 16 mai 1720. Enjoint Sa Majesté aux dits officiers et cavaliers de leur obéir sous les peines portées par le dit article.
3. Et pour mettre Sa Majesté à portée de connoitre les sujets les plus propres à remplir les charges de prévôts et de lieutenants des dites maréchaussées, elle veut et entend qu'à l'avenir, il luy soit présenté, par les maréchaux de France, trois sujets sur lesquels Sa Majesté choisira celuy qu'elle jugera à propos pour être pourvû de la charge vaccante, lequel, après l'obtention des provisions qui luy seront expédiées sur le certificat du Secrétaire d'Etat ayant le département de la guerre, sera tenû de se présenter aux maréchaux de France pour avoir leur attache et être ensuite reçu au siège de la Connétablie en la manière ordinaire.
4. Les places d'exempts, brigadiers, sous-brigadiers, et cavaliers, continueront d'être exercées conformément à l'article 5 de l'édit de création du mois de mars 1720, sur des commissions expédiées par le secrétaire d'Etat ayant le département de la guerre et scellées du grand sceau, lesquelles Sa Majesté fera délivrer à ceux qui luy seront proposés par le prévôt général du département et ils seront ensuite reçus par le dit prévôt sans aucun frais, information de vie et moeurs par luy préalablement faitte.
5. Fait déffenses Sa Majesté aux dits prévôts généraux d'exiger de ceux qu'ils proposeront pour les places d'exempts, brigadiers, sous-brigadiers et cavalier, aucun droit de nomination, ny d'en recevoir, quand il leur en seroit volontairement offert, à peine de punition, telle qu'elle sera ordonnée par les sieurs maréchaux de France, même d'être interdits s'ils le jugent à propos, conformément à l'article 2 de l'ordonnance du 16 mars 1720.
6. Les exempts seront pris alternativement parmi les brigadiers et sous-brigadiers des maréchaussées et dans les troupes de Sa Majesté ainsy qu'il s'est pratiqué depuis l'édit de création.
7. Les brigadiers et sous-brigadiers viendront à ces places par leur ancienneté, à moins que d'autres ne leur soient préférés par des raisons particulières et tendantes au bien du service.
8. Les places de cavaliers ne seront données qu'à des personnes de bonnes moeurs, d'une taille de 5 pieds quatre pouces au moins, qui sauront lire et écrire et qui autant qu'il sera possible, auront déjà servi dans les autres troupes de Sa Majesté.
9. Les cavaliers seront tenus d'avoir un cheval poil bai ou noir à eux appartenant, de la taille de ceux des dragons et de le harnacher d'une manière uniforme, d'après la housse et les chaperons qui leur seront donnés lors de l'habillement.
10. Dérogeant en tant que de besoin seroit aux articles 6 et 7 de l'ordonnance de discipline des maréchaussées du 16 mars 1720, veut et entend Sa Majesté qu'à l'avenir, chaque prévôt général soit tenu de faire deux tournées tous les ans dans les villes et lieux de résidance dans son département à l'effet de faire la revue des lieutenants exempts, brigadiers, sous-brigadiers et cavaliers, d'examiner si le service est fait exactement, si les officiers et cavaliers remplissent leur devoir et si les chevaux, armes et équipages sont en bon état. Lesquelles revues le dit prévôt général certiffiera et il enverra seulement un double aux sieurs maréchaux de France un autre au secrétaire d'Etat ayant le département de la Guerre, et un autre ez mains du dit prévôt général.
11. Dérogeant pareillement aux articles 7 et 9 de la même ordonnance du 16 mars 1720, veut et entend Sa Majesté qu'à l'avenir les lieutenants de chaque résidence soient tenus de faire tous les deux mois dans le chef lieu de chaque brigade, la revue des exempts, brigadiers, sousbrigadiers, et cavaliers dans lesquelles ils observeront si le service est fait exactement, si les officiers et cavaliers remplissent leur devoir : si les armes, les équipages et les chevaux des brigades sont en bon état, si les chevaux ne sont pas loés ou empruntés pour les dittes revues, leur donnant pouvoir, Sa Majesté, de punir pour le temps qu'ils jugeront convenable, savoir les cavaliers de prison, les brigadiers et sous-brigadiers des arrêtes, lorsqu'ils les trouveront en déffaut sur quelques unes des parties de leur service, et à l'égard des exempts, qu'ils pourront trouver répréhensibles sur leur service, ils en rendront compte au prévôt général du département et l'informeront de ce qu'ils auront trouvé dans leur revue dont un double sera envoyé au prévôt général et l'autre restera entre leurs mains.
12. Lorsque le prévôt général ou celuy qui commandera en son absence aura mis aux arrêts quelqu'un des exempts, il en rendra compte aux sieurs maréchaux de France et au secrétaire d'Etat ayant le département de la guerre.
13. Les lieutenants n'employeront dans leurs revues que les exempts, brigadiers, sousbrigadiers et cavaliers qui seront présents à peine de trois mille livres d'amende et de perte de leur charge sans que la ditte peine puisse être réputée comminatoire.
14. A l'égard des officiers et cavaliers qui pour cause de maladie ou d'absence pour le service ou par congé ne pourroient se trouver aux dittes revues, les lieutenants seront tenus de constater dans leurs états de revue la cause de l'absence des dits officiers et cavaliers.
15. Seront encore tenus les lieutenants de constater la mort des officiers et cavaliers qu'ils trouveront décédés et de joindre à leurs étés de revue l'extrait mortuaire des dits officiers qu'ils se feront expédier en bonne forme.
16. Et en cas que les sieurs intendants se trouvent sur les lieux dans lesquels les prévôts généraux feront leurs revues, les dits prévôts seront tenus d'avertir quatre jours d'avance les dits sieurs intendants du jour auquel ils voudront faire leur revue et de prendre d'eux l'heure à laquelle elle sera faite, pour être lesdittes revues faittes en leur présence et par eux visées, le tout néantmoins après avoir pris l'ordre du gouverneur de la province ou du commandant en son absence, et ou les dits sieurs intendants ne seroient pas sur les lieux, veut Sa Magesté, que les dits prévôts généraux ou leurs lieutenants soient tenus d'y appeler des subdélégués pour être présents aux dittes revues et icelles signées d'eux.
17. Les prévôts généraux enverront tous les trois mois au secrétaire ayant le département de la guerre, et au trésorier chargé du payement des maréchaussées, un état de revue de tous les officiers et cavaliers de leur département, lesquels seront payés sur le dit état qui sera visé par l'intendant ou son subdélégué.
18. Deffend Sa Majesté aux dits prévôts généraux d'employer dans le dit état aucun exempt, brigadier, sous-brigadier et cavalier qu'il n'ait été passé présents dans les états de revue prescripts par l'article 13 de la présente ordonnance ou qu'il n'apparoisse par les dits états qu'il n'a pu se trouver aux dittes revues pour des causes légitimes à peine de 30000 mille livres d'amende et de perte de leurs charges.
19. Les exempts, brigadiers et sous-brigadiers feront assembler leur brigade, chacun dans leur résidence, deux fois par mois, à l'effet de vériffier si les armes, équipages et chevaux sont en bon état, dont ils rendront compte au lieutenant de leur résidance : enjoint Sa Majesté aux dits exempts, brigadiers et sous-brigadiers de veiller et tenir la main à ce que les cavaliers ne louent ny ne prêtent leurs chevaux et d'en informer le lieutenant de leur résidance.
20. Dans les villes où il y a plusieurs brigades, l'officier supérieur en grade ou bien à grade égal, l'ancien de service dans les maréchaussées, sera chargé de faire assembler les dittes brigades conformément à l'article précédent.
21. Ne pourront les prévôts généraux, s'absenter de leurs départements sans la permission
du commandant de la province et un congé de la cour. Ne pourront pareillement les lieutenants, exempts, brigadiers, sous-brigadiers et cavaliers sortir de leur résidance sans un congé par écrit du prévôt général, conformément à l'article 11 de l'ordonnance du 16 mars 1720 et sous les peines y portées.
22. Pourront néantmoins les exempts, brigadiers, sous-brigadiers, et cavaliers s'absenter du lieu de leur résidence pour huit jours seulement avec une permission par écrit du lieutenant de la ditte résidence, et les cavaliers, pour quatre jours seulement, avec une permission par écrit du commandant de leur brigade, desquelles permissions il sera rendu compte par les exempts, brigadiers et sous-brigadiers au lieutenant de leur district et par ce dernier au prévôt général.
23. Conformément à l'article 8 de l'ordonnance du 16 mars 1720, lorsque le service exigera quelque détachement extraordinaire de plusieurs brigades, veut et entend Sa Majesté, que sur l'ordre que les lieutenants en recevront par écrit du prévôt général, ils puissent prendre plusieurs et même toutes les brigades du département et les conduire par tout où le service le demandera et pour le nombre de jours qui seront portés par le dit ordre. Enjoint Sa Majesté aux officiers et cavaliers des dittes brigades d'obéir au lieutenant qui sera chargé du dit ordre et qui informera régulièrement le prévôt général de son exécution, desquels ordres et détachement, il sera rendu compte par le prévôt au secrétaire d'Etat ayant le département de la guerre et à celuy des autres secrétaires d'Etat qui luy aura donné des ordres.
24. Il sera tenu un journal par les exempts, brigadiers et sous-brigadiers, sur lequel ils auront soin d'inscrire les journées ordinaires qu'ils auront faittes et les courses extraordinaires auxquelles les cavaliers auront été employés pour le service, lequel journal ils remettront tous les mois au lieutenant de leur district.
25. Les lieutenants enverront tous les mois au prévôt général du département, les journaux des tournées et courses extraordinaires que les brigades de leurs district auront faittes pour le service.
26. Les prévôts généraux enverront tous les deux mois au secrétaire d'Etat ayant le département de la Guerre, les actes des brigades de leur département, dans lesquels ils sera fait mention des tournées journallières et du service auquel elles auront été employées et les les dits prévôts généraux l'informeront de ce qu'ils auront appris d'intéressant.
27. Veut et entend Sa Majesté que conformément à l'article 16 de l'ordonnance du 16 mars 1720, les officiers et cavaliers de Maréchaussée soient admis à l'Hostel des Invalides lorsqu'ils seront hors d'état de continuer leurs services, sçavoir les prévôts généraux comme lieutenants colonels de cavalerie lorsqu'ils auront servi tant en la qualité de capitaine en pied qu'en celle de prévôt général le terme et espace de vingt ans. Les lieutenants, comme capitaines, après vingt ans de service, tant en qualité de lieutenants de maréchaussée qu'en celle de lieutenant en pied. Les exempts en qualités de lieutenants après vingt ans de service, dont il faudra qu'il y en ait dix avec rang d'officier dans quelques corps de troupes réglées que ce soit ou dix dans la maréchaussée en qualité d'exempt. Et les brigadiers, sous-brigadiers et cavaliers dans la troisième classe du dit Hostel.
28. Ordonne Sa Majesté que les cavaliers de maréchaussée malades seront reçus aux hospitaux des lieux de leur résidence et s'il n'y en a point, à l'hospital le plus prochain, pour y être traités suivant les usages pratiqués pour les autres troupes de Sa Majesté et sera fait en conséquence à chaque cavalier qui aura été soigné ez dits hospitaux, une retenue de sept sols par jour sur la solde.
Titre second : des honneurs dus par les maréchaussées
1. Les compagnies de maréchaussée rendront les honneurs au Roy , à la famille royalle, au prince du sang et aux sieurs maréchaux de France.
2. Les prévôts généraux seront tenus de monter à cheval à la tête de leur troupe dans les villes de leur département, lors des entrées du Roy, de la reine, de la famille royalle et des princes du sang.
3. Seront pareillement tenus les prévôts généraux de monter à cheval à la tête de leur troupe seulement le jour de l'entrée et réception du Gouverneur et lieutenant généraux des provinces.
4. Lors des rentrées des cours et autres cérémonies publiques, le prévôt général ou celuy qui commandera en son absence sera tenu de faire trouver aux dittes cérémonies, à l'heure qui lui aura été indiquée par le premier président ou par celui qui présidera la Compagnie, un détachement commandé par un lieutenant conformément à ce qui est prescrit par l'arrêt du Conseil d'Etat du 8 janvier 1724, lequel détachement ne pourra être composé de moins que des brigades établies dans la ville de la résidence des dittes cours.
5. Lors du passage du Roy, de la Reine et de la famille royale, et pendant leur séjour dans les différentes villes du Royaume, le prévôt général de chaque département commandera toutes les brigades que le secrétaire d'Etat ayant le département de la Guerre aura jugé à propos d'assembler pour la sûreté des chemins et il se tiendra avec une ou plusieurs brigades dans le quartier qui luy aura été indiqué.
6. Sur l'avis que les prévôts généraux recevront de l'arrivée dans leur département de quelqu'un des princes et princesses du sang, ils enverront des ordres pour que les brigades de maréchaussée les accompagnent sur leur passage d'une résidence à l'autre.
7. Sur l'avis que les dits prévôts généraux recevront de l'arrivée d'un des sieurs maréchaux de France, dans leur département, ils seront tenus de donner des ordres pour que les brigades de maréchaussée établies le long de la route se trouvent sur son passage, pour être ne état de l'accompagner d'une résidence à l'autre, jusqu'au lieu où il fera séjour, pendant le quel il aura, s'il le juge à propos, une garde composée d'une brigade commandée par un exempt et à son départ les dits prévôts généraux seront tenus de faire pareillement trouver sur son passage les brigades établies sur sa route pour être en état de l'accompagner jusqu'à ce qu'il soit sorti de leur département.
8. Fait déffenses Sa Majesté aux prévôts généraux et à tous officiers de maréchaussée de rendre à qui que ce soit aucuns honneurs au delà de ce qui est fixé cy dessus, à moins d'ordres exprès de Sa Majesté et au cas que quelqu'un exige quelques honneurs autres que ceux qui sont ordonnés, les prévôts généraux seront tenus d'en rendre compte aux sieurs maréchaux de France et au secrétaire d'Etat ayant le département de la Guerre.
Titre troisième : Du Service ordinaire des Maréchaussées
1. Chaque exempt, brigadier et sous-brigadier détachera journellement deux cavaliers de sa brigade pour faire des tournées sur les grands chemins et sur ceux de traverse et montera luymême à cheval à la tête du détachement plusieurs fois par semaine et aussy souvent que le besoin pourra le requérir.
2. Les tournées seront faittes chaque jour dans des endroits différents et beaucoup plus fréquemment dans les routes dangereuses comme celles qui sont près des forêts, montagnes et vallons.
3. Les cavaliers feront constater la vérité de leurs tournées par des certificats des magistrats ou du curé et à leur déffaut l'un des principaux habitants des lieux qu'ils auront parcourus.
4. Les cavaliers feront aussy des tournées dans les foires et marchés publics des villes et lieux de leur district pour y maintenir le bon ordre et veiller à la tranquillité publique; ils arrêtront les filloux et gens sans aveu qui pourront se rencontrer aux dittes foires.
5. Le commandant de brigade sera tenu de se transporter à la tête de sa brigade le jour des festes de paroisses dans les lieux de son district pour le maintien du bon ordre et veiller à la tranquillité publique.
6. Les cavaliers arrêteront dans leurs tournées tant sur les grands chemins que dans les villes tous ceux qui leur paroitront suspects, n'ayant ny passeports, ny certifficats pour se faire connoitre.
7. Ils conduiront les particuliers qu'ils auront arrêtés dans les prisons de leur résidence, s'il y en a, sinon dans les prisons les plus prochaines et ils dresseront leur procès verbal de capture, dans lequel il sera compris l'inventaire des effets et argent trouvés sur les dits particuliers, lequel procès verbal ils seront tenus de faire signer à deux habitants les plus proches du lieu de la capture.
8. Et pourront se rencontrer des déserteurs parmi ces particuliers arrêtés, ils seront écroués comme étant soupçonnés de désertion.
9. Le commandant de la brigade, dont les cavaliers auront fait la capture, s'informera par luy-même de la vérité des faits qui auront donné lieu à la capture du particulier arrêtté et dressera un procès-verbal des déclarations qui luy auront été faittes par le particulier arrêtté sur les questions que le dit commandant luy fera à ce sujet, lequel procès-verbal sera signé tant du commandant que du prisonnier, sinon sera fait mention de son refus ou de sa déclaration, qu'il ne sait ou ne peut signer, pour le dit procès-verbal de déclaration être envoyé, ainsy que celuy de capture au lieutenant du district qui en rendra compte au prévôt général et les dits effets papiers et argent être déposés au greffe de la lieutenance du lieu où le dit particulier aura été arrêtté.
10. Les exempts, brigadiers et sous-brigadiers feront, lorsqu'ils en auront reçu les ordres du prévôt général ou de leur lieutenant ou, à déffaut d'ordre, lorsqu'ils le jugeront convenable, des patrouilles avec leurs brigades dans les villes et lieux de leur résidence et se feront représenter la liste des étrangers arrivés dans les auberges pour vériffier le signalement de ceux dont la découverte est nécessaire, et à cet effet renouvelle Sa Magesté, les dispositions de l'édit du mois d'octobre 1631 et celles de l'ordonnance du 25 avril 1707 concernant le guet, patrouille des cavaliers et l'obligation des aubergistes de représenter la liste des étrangers logés chez eux.
11. Lorsque les commandants des brigades recevront des ordres pour faire marcher leur troupe, l'exécution de ces ordres tiendra lieu de tournée journalière et il en sera fait mention dans le journal des tournées et courses que les exempts, brigadiers et sous-brigadiers seront tenus d'envoyer au lieutenant de leur résidence en conformité de l'article XXIV du titre Ier de la présente ordonnance.
12. Sur l'avis que le prévost général recevra du passage des troupes dans son département, il donnera des ordres ou celui qui commandera en son absence, affin que les différentes brigades se tiennent sur le flanc et en arrière de la marche des trouppes pour contenir dans l'ordre ceux qui pourroient s'en écarter.
13. Les cavaliers de maréchaussée arrêtront les déserteurs et les conduiront dans les prisons de leur résidence, et s'il n'y en a point, dans les plus prochaines.
14. Le commandant de la brigade qui aura arrêté un déserteur en enverra sur le champ le
procès-verbal de capture au lieutenant de sa résidence qui en informera le prévost général lequel en rendra compte au secrétaire d'état ayant le département de la guerre.
Titre quatrième : Du service extraordinaire des maréchaussées
1. Le prévost général ou en son absence l'officier qui le représentera apportera toute la diligence nécessaire pour l'exécution des ordres de Sa Magesté soit que les dits ordres lui parviennent directement ou qu'ils lui soient remis ou communiqués par les gouverneur, lieutenant général, commandant et intendant de la province ou telle autre personne à laquelle les dits ordres auront été envoyés et il veillera à leur exécution en prenant les mesures les plus certaines pour que les officiers qu'il aura chargés des dits ordres les exécutent sans délais.
2. Les officiers et cavaliers seront en conséquence tenus sous les peines de désobéissance de se conformer pour l'exécution des dits ordres à ce qui leur aura été commandé par le prévôt général ou en son absence par l'officier qui le représentera et à déffaut des dits officiers par le commandant de la brigade.
3. Veut et entend Sa Magesté que dorésnavant la maréchaussée ne puisse être employée sous aucun prétexte à aucunes fonctions étrangère à son établissement.
4. Le nombre des cavaliers nécessaire pour escorter le transport des deniers royaux continuera d'être fourni sur les avis qui seront donnés et les réquisitions qui en seront faites par ceux qui seront chargés du transport des dits deniers.
5. Ne pourront les officiers et cavaliers écrouer les prisonniers, si ce n'est ez matières de la compétence des prévôts, ny exploiter hors des cas prévôtaux conformément aux ordonnances, et en conséquence leur déffend Sa Magesté et sur les mêmes peines portées par les ordonnances de s'immiscer directement ny indirectement dans l'exécution des jugements ou mandements pour lesquels ils prêtront main-forte mais assisteront seulement pour que force demeure à justice.
6. Les procès-verbaux d'excès commis envers les officiers et cavaliers de maréchaussée dans leurs fonctions seront à la diligence des commandants de brigades envoyés sans délai au greffe de la maréchaussée du département sous lequel les dites brigades se trouveront distribuées et si les coupables ont été arrêtés lors des dits excès, enjoint Sa Magesté aux dits commandants de les faire conduire le plus dilligemment que faire se pourra aux prisons du dit département pour y être détenus à la requête du substitut en la maréchaussée du dit département et être incontinent interrogés sur les faits résultant des dits procès-verbaux et seront les dits procez-verbaux ensemble ceux de capture et conduitte ez dittes prisons et les dits interrogatoires à la dilligence du dit substitut envoyés au procureur de Sa Magesté en la connétablie et maréchaussée de France à la la Table de marbre du palais à Paris pour être, sur ses conclusions, statué au dit siège, ce qu'au dit cas appartiendra.
7. Veut et entend Sa Magesté que les officiers et cavaliers de maréchaussée soient tenus de se conformer dans leurs fonctions à ce qui est prescrit par l'ordonnance de 1670 et autres édits, déclarations et règlements concernant les dites fonctions en ce qui n'est pas contraire à la présente ordonnance.
8. Mande et ordonne Sa Magesté aux sieurs maréchaux de France, à ses gouverneurs et lieutenants généraux ou commandants dans les provinces du royaume et à tous ses officiers qu'il appartiendra de tenir, chacun en ce qui les concerne, la main à l'exacte observation et exécution de la présente ordonnance, laquelle Sa Magesté veut être enregistrée en la connétablie et maréchaussée de France à la Table de Marbre du Palais à Paris et autres maréchaussées du royaume, lues et publiée à la tête des compagnies des dites maréchaussées lors de la première revue des inspecteurs et affichée partout où besoin sera, à ce que personne ne puisse prétendre cause d'ignorance.
Fait à Versailles, le 19 avril 1760, signé Louis, et plus bas, le Maréchal Duc de Belle-Isle.
L'organisation de la maréchaussée a encore été modifiée ou complétée par l'importante ordonnance du 28 avril 1778, dont les titres sont les suivants : La constitution, composition et formation de la maréchaussée (29 articles), la subordination et la discipline (26 articles), les fonctions des officiers de maréchaussée (35 articles), le service ordinaire des brigades (23 articles), le service extraordinaire de la maréchaussée (16 articles), les honneurs à rendre (1 article), les appointements et la solde de la maréchaussée (7 articles), les fourrages (10 articles), le logement (9 articles), les remontes (13 articles), la bourse commune (6 articles), les revues des commissaires des guerres (21 articles), l'équipement, l'habillement et l'armement (12 articles), les récompenses militaires, privilèges et exemptions ( (5 articles) (4). Cette ordonnance contient des articles propres à la Bourgogne, à la Bresse, au Bugey et au Pays de Gex en raison du statut particulier du prince de Condé qui possédait le droit de nommer aux offices depuis 1721 dans ces provinces (5).
L'organisation de la maréchaussée et particulièrement sa division en compagnies, a été modifiée par deux autres ordonnances du roi, du 3 octobre 1778 et du 18 juillet 1784 (6)
Organisation et compétence judiciaires de la maréchaussée
La compétence de la maréchaussée en matière judiciaire a été réglementée par divers actes du pouvoir souverain, citons, pour le XVIIIe siècle :
Déclaration du roi sur les cas prévôtaux ou présidiaux, du 5 février 1731.
Cette déclaration importante, qui complétait dans ce domaine, la grande ordonnance de 1670, précisait les compétences respectives des juges ordinaires et des prévôts. Les articles 8 à 10 méritent d'être cités, car ils conditionnent la recherche dans tel ou tel fonds :
"8. Les sièges présidiaux ne prendront connoissance des cas qui sont prévôtaux par la qualité des accusés ou par la nature du crime que lorsqu'il s'agira de crimes commis dans la sénéchaussée ou bailliage dans lequel le siège présidial est établi. Et à l'égard de ceux qui auront été commis dans d'autres sénéchaussées ou bailliages, quoique ressortissants au dit siège présidial, dans les deux cas de l'édit des présidiaux, nos baillis et sénéchaux en connoitront à la charge de l'appel en nos cours de parlement, conformément à la déclaration du 29 may 1702.
"9. En cas de concurrence de procédures, les présidiaux, même les baillifs et sénéchaux auront la préférence sur les prévôts des maréchaux, s'ils ont informé et décrété avant eux, ou le même jour.
"10. Nos prévôts, châtelains et autres nos juges ordinaires, même ceux des hautes justices connoitront, à la charge de l'appel en nos cours de parlement, des crimes qui
ne sont pas du nombre des cas royaux ou prévôtaux par leur nature, et qui auront été commis dans l'étendue de leur siège et justice, par les personnes mentionnées dans les articles premier et second de la présente déclaration (7), même de la contravention aux édits et déclarations sur le fait de la mendicité et ce, concurremment et par prévention avec les dits prévôts des maréchaux et préférablement à eux s'ils ont informé et décrêté avant eux ou le même jour."
Déclaration du 30 avril 1772 "portant que les prévôts des maréchaux de France, leurs lieutenans et assesseurs feront juger leur compétence au présidial établi dans le lieu de la résidence du siège de la maréchaussée, et à défaut d'établissement de présidial en ce lieu, au présidial le plus prochain, et qu'ils feront porter les procès au siège royal établi dans le lieu de leur résidence".
Cette ordonnance ne fut pas adressée au parlement de Dijon, à qui le roi dut adresser des lettres de surannation :
Lettres de surrannation qui ordonnent que la déclaration du 30 avril 1772 qui enjoint aux prévôts des maréchaux de France, leurs lieutenants et assesseurs de faire juger leur compétence au Présidial établi dans le lieu de la résidence du siège de la Maréchaussée, sera exécutée, du 30 janvier 1774.
Arrêt du parlement [de Dijon] concernant les procédures criminelles commencées en la Maréchaussée, du 3 février 1784 ("la cour ordonne que les procédure criminelles commencées en la maréchaussée pour délits, de la compétence des juges des lieux, seront, après le jugement de compétence rendu au présidial, renvoyées auxdits juges, pour être par eux les dites procédures continuées jusqu'au jugement définitif, sauf l'appel à la cour, si mieux n'aiment les dits officiers renvoyer les dites procédures au bailliage, à la forme de l'édit du mois de mars 1772").
La maréchaussée en Bresse
La lieutenance de la maréchaussée de Bresse faisait partie de la prévôté générale de Bourgogne, dont les officiers étaient nommés par le gouverneur de la province.
"Au XVIIIe siècle, la maréchaussée de Bresse et Bugey fut modifiée. Les prévôts particuliers ayant été supprimés, elle se composa d'un lieutenant de prévôt, d'un souslieutenant, d'un assesseur, d'un procureur du roi, d'un greffier et de cinq brigades formées chacune d'un brigadier et de trois cavaliers et ayant leurs résidences à Bourg, Montluel, Saint-Julien-sur-Reyssouze, Neuville-sur-Ain et Saint-Laurent ...
Une déclaration royale du 6 mai 1692 donna dans certains cas aux juges ordinaires, la connaissance des causes prévôtales. Le prévôt devait-il dans ces sortes de procès siéger avec les magistrats ? Le présidial refusa longtemps d'ouvrir ses rangs à son ancien ennemi. Le conflit se termina par une transaction du 30 août 1710, inspirée par l'intendant de Bourgogne, et dont voici le texte :
"Le sieur Michel Du Villars, prévôt de la Maréchaussée, et ses successeurs, auront rang et séance en la Chambre du Conseil, lors du rapport et jugement des affaires prévôtales, immédiatement après le chevalier d'honneur et avant le doyen des conseillers. Il aura voix de délibération, ainsi que les autres conseillers, dans les affaires prévôtales tant seulement ..."
De même que le prévôt, l'assesseur prévôtal avait voix délibérative, dans les affaires prévôtales, sans toutefois pouvoir faire le rapport. Il prenait rang après le dernier conseiller et, sous aucun prétexte, n'était admis à suivre le présidial dans les cérémonies publiques...
Le prévôt et l'assesseur étaient installés dans la chambre du conseil en habit noir et en perruque longue" [...]
"Comme les officiers du présidial, les officiers de la maréchaussée étaient nommés par lettres de provisions. Seulement l'arrêt du parlement était remplacé pour eux par un arrêt de réception au siège de la connétablie et maréchaussée de France" (8).
La lieutenance de Bourg était composée des brigades de Bourg, Saint-Julien-sur-Reyssouze et Montluel. L'ordonnance du 21 mai 1782 créa en outre les brigades de Saint-Laurent et Pont-d'Ain (9). La brigade de Châtillon-lès-Dombes fut crée ensuite par ordonnance du 23 avril 1783. Entre-temps, après la réunion de la Dombes à la France, la brigade de Montluel avait été rattachée à la lieutenance de Trévoux et celle de Chalamont à celle de Bourg (1782). Rappelons que le droit de nommer les officiers de la maréchaussée de Bourgogne, Bresse, Bugey et Valromey (hormis le prévôt général) appartenait au duc de Bourbon (Condé) depuis l'édit de juillet 1721 (10). Lorsque le 28 avril 1778, le roi supprima la vénalité des offices des maréchaussées et lorsqu'il eut assimilé la maréchaussée de Bourgogne aux autres maréchaussées de France, il versa une indemnité de 15 000 livres annuelles au duc de Bourbon (11).
"La maréchaussée de Bresse est sur le pied d'une compagnie réglée composée d'un grand prévôt, de son lieutenant, d'un commissaire, d'un greffier et de 12 archers"(12).
Notes
(1) Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence […], Paris, 1785, t. 11, p. 295.
(2) Combes (Louis de), Le Présidial de Bourg et le bailliage de Bresse, Bourg, 1874, p. 55-65
(3) Ce texte a été enregistré dans le registre conservé sous la cote 17 B 4.
(4) Le texte à peu près intégral est donné par : Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence […], Paris, 1785, t. 11, p. 296-317.
(5) Titre 1, articles 8, 16, 20.
(6) Guyot, ibidem, p. 296
(7) Il s'agissait des "vagabonds", "gens sans aveu"," mendiants", "condamnés à peines corporelles, banissement ou amende honorable".
(8) De Combes (Louis), Le Présidial de Bourg et le bailliage de Bresse, Bourg, 1874, p. 55-65
(9) Bossi, Statistique générale de la France, Département de l'Ain, Paris, 1808, p. 414
(10) Le texte de cet édit est donné par Desmaris (Christophe) La Maréchaussée en Bresse, 1721-1789, mémoire de maîtrise, Lyon II, 1988, dans ses pièces justificatives.
(11) Lettres patentes concernant les maréchaussées du ressort [du parlement de Dijon], du 28 avril 1778
(12) Mémoire sur la Bourgogne par Ferrand, v. 1698, p. 517.