Les traites foraines
"On appelle droits de Traite des droits qui se lèvent sur les denrées et les marchandises, soit lorsqu'elles entrent dans le royaume, soit lorsqu'elles en sortent, ou qu'elles passent dans différentes provinces.
"Les droits de Traite ont été principalement établis pour favoriser les productions du sol et de l'industrie des régnicoles, pour faciliter l'exportation du superflu des marchandises et denrées nationales, et pour restreindre, autant que les besoins pourraient le permettre, l'importation des marchandises et denrées étrangères"(1).
"Par un édit du 3 octobre 1581, Henri III établit, à l'entrée de toutes les marchandises et denrées qui feraient tirées des pays étrangers, un droit de deux pour cent de leur valeur ; les provinces qui étaient réputées étrangères furent assujetties au payement de ce droit". "En 1621, un nouveau motif engagea Louis XIII à multiplier les bureaux des Traites : ce prince ayant reconnu qu'il n'en existait aucun dans quelques provinces frontières, ni du côté de l'étranger, ni du côté de l'intérieur du royaume, il ordonna qu'il en ferait établi de l'un des deux côtés à leur choix. La bourgogne ayant préféré la liberté de commerce qu'elle avait avec les provinces de l'intérieur, les bureaux furent établis sur les frontières, du côté de la Franche-Comté, qui était étrangère alors. Alors les bureaux qui existaient dans la Normandie, la Picardie, la
Champagne, la Bourgogne, le Poitou, le Berri, le Bourbonnois et l'Anjou formèrent une chaîne continue, et l'enceinte qu'ils renfermèrent fut appelée l'étendue des cinq grosses fermes. Toutes les provinces extérieures furent réputées étrangères, sans en excepter même le Languedoc, le Lyonnais et la Provence, qui cependant se trouvaient dans des circonstances particulières" (2).
Ce système complexe de perception de droits fut simplifié par l'édit de septembre 1664. "Le tarif de 1664 avait été projeté pour avoir lieu à toutes les entrées et sorties du royaume ; il fut en conséquence proposé à toutes les différentes provinces, mais plusieurs préférèrent de s'en tenir à leurs anciens tarifs : celles qui acceptèrent le tarif de 1664 sont connues sous la dénomination de provinces des cinq grosses
fermes ; celles qui s'y refusèrent furent appelées provinces réputées étrangères, parce qu'elles étaient effectivement étrangères au tarif dont elles ne suivaient pas la loi. Le tarif annexé à l'édit du mois de septembre 1664 se divise en deux parties. La première concerne le droit de sortie, et la seconde le droit d'entrée, qui remplacent les différents droits supprimés par cet édit" (3).
La Bresse étant limitrophe de la Franche-Comté, il faut connaître quelque peu la réglementation propre à cette province annexée récemment à la France :
"La Franche-Comté, cédée à la France en 1678, par la paix de Nimègue, n'a point de tarif de droits qui lui soit particulier, elle n'est sujettée qu'aux droits uniformes établis par les règlements intervenus depuis 1664 : il a été fait une collection de tous ces règlements […] : "le tarif de Franche-Comté" ; mais toute marchandise qui n'a été, ni prohibée, ni imposée à des droits généraux et uniformes à toutes les entrées et sorties du royaume, vient librement de l'étranger dans cette province, et en sort de même pour l'étranger, sans avoir rien en cas à payer, ni à l'entrée, ni à la sortie. Suivant l'article 3 du titre premier de l'ordonnance de 1687, les provinces des cinq grosses fermes font, la Normandie, à la Picardie, la Champagne, la Bourgogne, la Bresse, le Bugey, le Bourbonnois, le Berri, le Poitou, le pays d'Aunis, l'Anjou et le Maine, et celles qui y sont renfermées, comme le Soissonnois, l'Isle de France, la Bauce, la Touraine, le Perche, etc. Le Beaujolais a été ajouté à ces provinces par un arrêt du 40 avril 1717" (4).
La justice des traites foraines en Bresse
"Les juges des traites foraines sont ceux qui connaissent des contestations qui arrivent pour les droits qui le perçoivent sur les marchandises qui entrent ou qui sortent du Royaume. Les appellations de ces juges appellés Maîtres des Portes, ressortissent aux cours des Aydes de leur ressort, et doivent être relevées dans quarante jours. Ils connaissent encore des marchandises de contrebande, et de beaucoup de matières qui regardent l'entrée et la sortie des personnes et des choses hors le Royaume, suivant l'Ordonnance d'Henry II du mois de Septembre 1549" (5).
Le tribunal des traites foraines de Bresse connaissait essentiellement des affaires relatives aux douanes. Il se composait d'un juge, d'un lieutenant et d'un procureur du roi.
Le bureau principal était situé à Bourg, mais on comptait de nombreux petits bureaux locaux. Parmi ces bureaux locaux on peut citer, au XVIIIe siècle ceux d' Aromas, Bourg, Coligny, Condeissiat, Cormoz, Domsure et Villeneuve, Hautecour, Loyes, Montfleur et Saint-Julien en Comté, Montluel, Pont-d'Ain, Pressiat, Thoirette.
Ce fonds très peu important contient surtout des procès-verbaux de saisies aux postes situés sur les frontières qui séparaient la Bresse du Lyonnais, et surtout de la Franche-Comté, avec quelques sentences et plaintes contre les brigades et quelques réceptions d'offices. Les procès-verbaux dressés par les employés des brigades (qui dépendaient de l'adjudicataire général des fermes unies de France) étaient adressés au président des traites foraines de Bresse pour que l'affaire soit tranchée par le procureur du roi (saisie, confiscation).
Une grande partie des procès-verbaux dressés par les brigades pouvaient donner lieu aussi à des poursuites devant les juges de l'élection (contrebande de tabac), ou des gabelles (contrebande de sel), mais ce fonds ne semble pas avoir été conservé.
Notes
(1) Guyot, Répertoire universel et raisonné de jurisprudence civile, criminelle [etc.]. Paris, 1785, t. 17, p. 222
(2) Ibidem, p. 225.
(3) Ibidem, p. 227
(4) Ibidem, p. 285.
(5) Ferrière (Claude-Joseph de), Dictionnaire de droit et de pratique, Paris, 1754, t. 2, p. 87